Appel à la beauté

L'appel à la beauté (ou "argumentum ad formam") est un argument souvent utilisé par les théistes, qui invoquent l'existence de la beauté comme une propriété métaphysique qui ne peut pas être expliquée par des mécanismes matérialistes. Ils font valoir que la beauté ne peut provenir que d'un être supernaturel et omnipotent comme leur dieu. Dans une de ses formes courantes, les dons naturels d'un individu sont présentés comme étant un exemple de cette beauté supposément divine. Richard Dawkins résume cette forme dans Pour en finir avec Dieu: Comment un autre être humain ose-il faire de la si belle musique/poésie/art, alors que moi je ne peux pas? Ça doit être Dieu qui l'a fait.[1]

This is a French translation of Argument from beauty.
La comédie divine
Créationnisme
Les Running gags
Blagues à part (anglais)
Bêtisier (anglais)
v - t - e
Peu importe à quel point votre théorie est belle, peut importe à quel point vous êtes malins. Si elle est en désaccord avec l'expérience, elle est fausse.
Richard Feynman à propos des théories scientifiques "élégantes"

Cette argument est une forme d'argument téléologique.

Forme

  1. Si la beauté existe, alors Dieu existe.
  2. X est beau.
  3. Dieu existe.

Problème

Dieu a mis la baudroie (Melanocetus johnsonii) au fond de la mer afin que le genre humain ne pose jamais ses yeux sur sa face hideuse.
Si Dieu avait conçu le monde, ce ne serait pas / un monde fragile et défectueux tel que celui que nous voyons.
LucrèceFile:Wikipedia's W.svg

Le plus gros problème de l'appel à la beauté est qu'il ignore le fait que la perception de la beauté est un phénomène psychologique qui est aisément décrit en termes de principes évolutionnistes et de modèles neurologiques du traitement sensoriel. Il ignore également tout ce que l'univers renferme de laid voire de carrément dégoûtant. De plus, il n'y a pas de norme absolue de beauté et l'idée de beauté est entièrement subjective,[2] bien que nous puissions avoir évolué de telle façon que nous ayons beaucoup d'idées sur la beauté en commun. Cette argument tient pour évident le lien entre la providence divine et ce qui est perçu comme étant beau, qu'il s'agisse de la beauté naturelle ou d'une œuvre d'art. Personne n'a jamais essayé de présenter la logique derrière cet argument, et si quelqu'un devait s'y essayer, il devrait sortir de la pièce sous les rires.

Exemples

Intelligent design

Magnifiques feuilles d'automne...
Mais la beauté est dans l'œil de l'observateur.

Un exemple d'appel à la beauté est de dire que les feuilles d'automne sont vraiment très belles, puis d'affirmer que les arbres sur lesquels elles ont poussé ne peuvent pas être le résultat d'un hasard "moche". Cependant, d'un point de vue objectif, les couleurs des feuilles sont de simples variations dans la longueur d'onde de la lumière qu'elles réfléchissent, et cela n'implique pas plus l'existence d'un concepteur de feuilles que celle de Jack Frost. Pour preuve, une personne ne percevant pas les couleurs a peu de chance d'inférer l'existence de Dieu à la vue des feuilles d'automne.

Un autre exemple de cet argument est discuté dans le premier chapitre de Dieu n'est pas grand|God is Not Great, où une institutrice appelée Ms. Watts dis 'Voyez donc, les enfants, à quel point Dieu est puissant et généreux. Il a fait l'herbe et tous les arbres verts, la couleur la plus reposante pour nos yeux. Si la végétation était entièrement rouge ou orange, ce serait épouvantable'.[3] Hitchens réalise alors, comme n'importe qui ayant une connaissance minimale du concept de sélection naturelle, que ce sont nos yeux qui se sont adaptés à la nature et pas l'inverse. Nous avons simplement évolué de façon à percevoir ces couleurs répandues comme étant agréables à l'œil, histoire de ne pas dépenser toute notre énergie à essayer de ne pas voir les plantes.

Swinburne

Richard Swinburne a écrit:[4]

Dieu a des raisons, apparemment primordiales, pour fabriquer, non pas un monde à peu près ordonné (comme on l'a considéré jusqu'ici) mais un monde magnifique— dans la mesure de ce qui reste hors de contrôle des créatures. (Et Il a aussi des raisons, pourrais-je suggérer, même si les créatures exercent quelque influence sur le monde, de leur donner la perception de la beauté pour se développer, et aussi de la laideur à annihiler.) Donc Dieu a des raisons de faire un monde fondamentalement beau, bien qu'Il ait également des raisons de laisser aux créatures le pouvoir de déterminer une partie de la beauté et de la laideur; mais il semble avoir eu des raisons primordiales de ne pas faire un monde fondamentalement laid et impossible à améliorer pour les créatures. Par conséquent, s'il y a un Dieu il y a plus de raisons de s'attendre à un monde fondamentalement beau qu'à un monde fondamentalement laid. A priori, cependant, il n'y a aucune raison de s'attendre davantage à un monde fondamentalement beau qu'à un monde fondamentalement laid. . Par conséquent, si le monde est beau, ce fait serait une preuve de l'existence de Dieu. Dans ce cas, soit k 'il y a un univers physique ordonné', e 'il y a un univers beau', et h 'il y a un Dieu', P(e/h.k) sera plus grand que P(e/k). [...] Peu de gens, cependant, nieraient que notre univers (à part ses habitants animaux et humains, et ses aspects directement sous leur contrôle) a cette beauté. Les poètes, les peintres, ainsi que les hommes ordinaires, ont, au cours des siècles, admiré la beauté de la procession ordonnée des corps célestes, la dispersion des galaxies à travers les cieux (par certains côtés aléatoire, par certains côtés ordonnée), et les pierres, la mer, et le vent interagissant avec la Terre, 'le vaste firmament, et tout le ciel bleu éthéré', le clapotis de l'eau contre 'les vieux rochers éternels', et les plantes de la jungle et des climats tempérés, contrastant avec le désert et les terres arctiques désolées. Qui, doué de tous ses sens, pourrait nier qu'il y a de la beauté en abondance? Si nous nous limitons à l'argument issu de la beauté du monde inanimé et du monde végétal, il fonctionne assurément.

Toutes les prémisses de l'argument de Swinburne reposent sur trois idées:

  1. Dieu aime la beauté: Swinburne fait valoir que Dieu ne voudrait pas un monde "fondamentalement laid et impossible à améliorer pour les créatures".

Il n'y a aucune raison pour que cela soit vrai -- sûrement qu'un Dieu mauvais aimerait un monde laid, pour mieux torturer ses habitants. Et présumer que Dieu est bienveillant suscite toutes sortes de problèmes -- par exemple, pourquoi Dieu n'a pas tout fait beau?

  1. La beauté est aussi probable que la laideur: Swinburne avance que, a priori, "il n'y a aucune raison de s'attendre davantage à un monde fondamentalement beau qu'à un monde fondamentalement laid". Étant donnés les arguments évolutionnistes évoqués plus haut pour expliquer la perception de la beauté, cela est complètement faux -- on juge beau ou laid ce qui existe selon nos intérêts de survie.
  2. Notre monde est beau: Swinburne demande "[Q]ui [...] pourrai[...]t nier qu'il y a de la beauté en abondance?" Jusque-là, les arguments de Swinburne en faveur de l'existence objective de la beauté reposent entièrement sur l'existence des artistes et des poètes (et de leur public), qui apprécient dépeindre l'univers à travers des images et des mots; cela n'atteint pas le niveau de la preuve logique. Les gens font des tonnes de choses stupides pour des raisons stupides, et l'art pourrait bien être l'une d'entre elles; sa longue histoire et sa popularité sont ici hors de propos.

Arguments similaires

Un argument similaire est l'appel à l'orgasme féminin qui affirme que puisque l'absence d'orgasme chez certaines femmes (vraiment malchanceuses) n'est pas un obstacle à la reproduction, l'existence de l'orgasme féminin ne peut être qu'expliquée par le cadeau d'une Créatrice ultra-généreuse. Une variante peu utilisée fait remarquer que certains animaux, comme les renards et les cochons, ont des orgasmes plus longs que ceux des humains. La conclusion de cet argument amène d'intrigantes questions philosophiques sur la bonté, et le nombre de bras, du créateur divin, surtout quand on prend en compte les références bibliques à "l'agneau de Dieu".

Voir aussi

Versions en autres langues

File:Lang-en.gif
If you're looking for this article in English, it can be found at Appeal to beauty.

Références

  1. Dawkins, R. The God Delusion, 87
  2. Regardez le film Shrek si cela n'est pas déjà évident pour vous
  3. Hitchens, C. Dieu n'est pas grand, 2
  4. http://www.csus.edu/indiv/m/mccormickm/SwinburneArgumentFromDesign.htm
gollark: You cannot. This is impossible.
gollark: What an "interesting" channel. I'll sell 1 capitalism for 22 lc.
gollark: Maybe stop getting push notifications for *any message*.
gollark: It was a great notification, yes.
gollark: I should call them!
This article is issued from Rationalwiki. The text is licensed under Creative Commons - Attribution - Sharealike. Additional terms may apply for the media files.